Entre le IVe et le Ier s. av. J.-C., les Romains conquièrent l’ensemble du monde méditerranéen, entre l’Angleterre et le Sahara, Gibraltar et la Mer Noire. Et depuis le début de notre ère, qui marque le début de ce que nous appelons l’Empire, Rome gouverne cet énorme espace. Malgré les insuffisances de la logistique et des communications de l’époque, malgré un certain nombre de crises et de soulèvements, le monde romain vit dans une paix relative entre le Ier s. et le Ve s. quand la partie occidentale de l’empire sombre peu à peu dans le chaos, alors que la partie orientale survivait encore pendant mille ans. Comment les Romains ont-ils fait pour maintenir la paix dans un espace si énorme, si diversifié politiquement et culturellement, et avec une administration aussi réduite ? Les raisons sont multiples. D’un côté la Méditerranée était fatiguée des incessants conflits qui l’avaient traversée dans tous les sens, depuis le IIIe siècle av. J.-C., en nous limitant à l’histoire déterminée par les Romains. Tous aspiraient à la paix et étaient prêts à supporter la domination de ceux qui avaient réussi à pacifier le monde et l’ouvrir à la libre circulation – à condition que leur domination fût supportable. D’autre part, le monde était organisé en cités, et dans la mesure où il n’était pas question de toucher à cette structure fondamentale, une cause virtuelle de rébellion était supprimée – à condition que les cités ne fussent pas écrasées par l’une d’entre elles. Et apparemment, Rome réussit à faire fonctionner sans trop de heurts ce grand ensemble. Nous mettrons en évidence les raisons de cette réussite, qui étaient liées à l’originalité de la gouvernance d’alliances, typiques de l’État romain depuis ses lointaines origines. Sur tous les plans, la citoyenneté, le partenariat avec des alliés, la construction d’outils juridiques qui permettaient de trancher les conflits entre habitants de cités différentes, l’intégration progressive de tous les hommes libres dans la citoyenneté romaine sans qu’ils ne perdent leur citoyenneté d’origine, Rome inventa des mécanismes dont ceux qui construisent la Communauté européenne pourraient s’inspirer.